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La bien complexe problématique de la charge des travaux

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Rappelons tout d’abord les différentes catégories de travaux concernés et faisons ensuite une distinction selon que le bail comporte ou non une règle de leur répartition entre le bailleur et le preneur.

Quelles sont les différentes catégories de travaux ?

a) Les grosses réparations

Ce sont celles qui sont visées à l’article 606 du Code civil : « les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. Toutes les autres réparations sont d’entretien ».

Plus clairement, ces réparations sont celles qui ont trait à la structure de l’immeuble loué, généralement désignées par le terme « le clos et le couvert » (porte, fenêtre, toiture mais aussi portions de canalisations ou tuyaux insérés dans les murs ou le plafond).

b)  Les travaux de gros entretien

Ces travaux consistent à maintenir les locaux loués conformes à l’usage auquel ils sont destinés.

c)   Les travaux d’entretien et de réparations courantes

Dits également travaux de « menu entretien » et visés à l’article 605 du Code civil, ces travaux consistent à effectuer les réparations rendues nécessaires en raison des dégradations commises durant l’occupation des lieux loués par le preneur.

d)  Les travaux exigés par l’administration

Ces travaux consistent à mettre les locaux loués en conformité avec les diverses normes légales ou réglementaires.

Comment se repartit la charge des travaux entre le bailleur et le preneur ?

Il faut distinguer selon que le bail commercial contient ou non une ou des clause(s) spécifique(s) à ce sujet.

Hypothèse 1 : le bail ne contient aucune clause spécifique.

Dans cette hypothèse (assez rare), la répartition des travaux décrits ci-avant s’établit, en principe, comme suit :

. sont à la charge du bailleur :

  • les travaux de gros entretien et les grosses réparations,
  • les travaux d’embellissement dont le montant excède le coût de remplacement à l’identique,
  • les travaux nécessaires pour remédier à un vice de construction, à la vétusté ou à un cas de force majeure,
  • les travaux de mise aux normes et ceux prescrits par l’Administration ;

. sont à la charge du preneur :

  • les travaux d’entretien et de réparations

Cela résulte de l’obligation pour le preneur d’entretenir les locaux loués en réparant toutes les dégradations occasionnées par son occupation et de les restituer en fin de bail en bon état de réparation et d’entretien.

Hypothèse 2 : le bail contient une ou plusieurs clause(s) spécifique(s).

Il s’agit là du cas le plus courant et qui est généralement matière à « négociations » lors de la conclusion du bail.

Il est donc possible de déroger à la répartition légale (décrite ci-avant) et des clauses peuvent être stipulées dans le bail afin, le plus souvent, de faire supporter au preneur la charge de tout ou parties des travaux qui incombent normalement au bailleur.

Il faut néanmoins distinguer selon la nature de travaux concernés.

  • S’agissant de la clause relative aux travaux de grosses réparations : il est nécessaire de faire une distinction selon la date de conclusion (ou de renouvellement) du
  • Pour les baux conclus ou renouvelés avant le 5 novembre 2014 : il était alors possible de stipuler une clause mettant à la charge du preneur toutes les réparations des locaux loués, à condition toutefois que chaque grosse réparation soit clairement visée et spécifiée.
  • Pour les baux conclus ou renouvelés à compter du 5 novembre 2014 : il est désormais interdit de mettre à la charge du preneur les travaux suivants :
    • les travaux de grosses réparations visés à l’article 606 du Code civil ;
    • les travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté ou de mettre les locaux loués en conformité avec la réglementation dès lors qu’ils relèvent de la catégorie des grosses réparations.

Attention

Si le preneur manque à son obligation d’entretien des locaux loués, les grosses réparations rendues nécessaires par sa faute peuvent être mises à la charge du preneur.

Si le preneur fait réaliser des travaux sans en avertir le bailleur et qu’ils engendrent des grosses réparations, le bailleur peut refuser d’en supporter le coût.

  • S’agissant de la clause relative aux travaux d’entretien et de réparation : une clause du bail peut stipuler que tous les travaux et dépenses d’entretien et de gros entretien sont à la charge du preneur, à la seule exception des grosses réparations visées à l’article 606 du Code
  • S’agissant de la clause relative aux travaux de mise aux normes des locaux loués : une clause du bail peut stipuler que tous les travaux prescrits par l’Administration sont à la charge du

Cette clause doit toutefois être rédigée avec précision.

En conclusion

L’importance de ces clauses conventionnelles contraint à mettre l’accent sur la nécessité de bien « négocier » ces dernières lors de la conclusion du bail commercial, étant rappelé que ces dernières ont vocation à s’appliquer pendant toute la durée du bail et de ses renouvellements successifs (le bail renouvelé devant être conclu aux mêmes charges et conditions que le bail antérieur, à l’exception du montant du loyer).

Seule exception (évoquée plus haut) : les baux conclus ou renouvelés à compter du 5 novembre 2014 ne peuvent plus comporter de clause conventionnelle mettant à la charge du preneur les grosses réparations visées à l’article 606 du Code civil.

La conclusion d’un bail commercial est une opération à ne pas négliger car, outre les obligations induites incombant au preneur pendant toute la durée du bail, le contenu de ces clauses spécifiques constitue également un des principaux critères d’appréciation pris en compte lors de la cession du droit au bail ou du fonds de commerce.

Il est donc fortement conseillé de ne pas signer un bail commercial ou acquérir un droit au bail ou un fonds de commerce « les yeux fermés » mais au contraire de s’attraire les compétences d’un conseil spécialisé en cette matière.